Cyrano : Ah non ! C’est un peu court jeune-homme On pouvait dire, ô Dieu, bien des choses en somme, En variant le ton, par exemple, tenez : Curieux : Ce paradis, mais qui donc l'a trouvé ? Ravi : C’est un Eden ! C’est une Thébaïde Où gambadent le cerf et la biche timide ! Fiscal : Il vaut combien, ce superbe joyau ? Descriptif : C’est bien plus que cela ! Un château ! Mais que dis-je : « Un château ? » C’est plus beau que Versailles ! Dès qu’on l’a découvert, où voulez-vous qu’on aille ? Snob : C’est pour la haute et les seigneurs, je crois. Syndical : J’exige d’y aller, c’est un droit ! Biznes : C'est excellent pour des hommes d’affaires, Des symposiums, des congrès, des séminaires. Modeste : Bien plutôt, des ados, des enfants, Leurs parents, des handicapés, des immigrants. Pompier : Subséquemment, ces pierres entassées Refuseront toujours de partir en fumée. Tendre : Que de jeunes Diglous ont arpenté En soixante-dix ans, tes bois et tes sentiers ! Prévenant : Gardez- vous qu’un ministre en détresse Ne veuille l’acheter, au lieu de Val-Duchesse. Romantique : Le soir, la chanson du ruisseau, La chouette plaintive. Est-il rien de plus beau ? Bucolique : Citons la petite comtesse : « Chantons sur les chemins qui n’ont ni fin ni cesse. Voici l’heure où les prés, les arbres et les fleurs Dans l’air dolent et doux, soupirent leurs odeurs » Théâtral : Seul, Monsieur, l’Alhambra de Grenade Pourrait rivaliser au nombre des arcades. |
Illustration de Pierre Defoux
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Nostalgique : Dormir sous ton toit, une nuit Chasserait pour toujours mes tracas, mes ennuis. Respectueux : Souffrez, Monsieur, qu’on vous salue, Quel plaisir de rouler sans bouchon dans la rue ! Humant : Babylone et ses jardins ne sont rien Comparés aux senteurs de la menthe et du thym. Obelix : Hum… Dévorer des tonnes de truites Et de gros sangliers avec des truffes cuites. Ecolo : Chacun s’y sent protégé : lézards abeilles, écureuils et même les renards ! Médical : L’eau du puits, si limpide et si pure Vous ferait digérer la brique la plus dure. Sublime : C’est « un temple où de vivants piliers Laissent parfois sortir de confuses paroles. L’homme y passe à travers des forêts de symboles Qui l’observent avec des regards familiers » Reprenant Baudelaire, bien sûr, mot pour mot. Enfin parodiant du Bellay en un sanglot : Ah ! je l’aurai chéri ce paisible ermitage " Qui m’est une province et beaucoup davantage…. Plus me plaît ce séjour qu’ont bâtit mes aieux Que des buildings urbains les fronts audacieux." Voilà ce qu’à peu près, mon cher, vous pouviez dire. La Diglette est un rêve aux multiples sourires Où la paix des grands bois vous rapproche de Dieu. Et croyez-vous vraiment qu’au ciel ce sera mieux ? Intervieweur Robert De Coster sj 2001 |